Éditorial de La Tribune des Travailleurs n° 458 du 25 septembre 2024
Par Daniel Gluckstein
L’éditorial des Échos reflète généralement l’état d’esprit des cercles dirigeants du capital financier. Celui du 23 septembre ne tarit pas d’éloges pour « le nouveau gouvernement(qui) a de quoi rassurer le monde de l’entreprise ». Les Échos applaudissent « la méthode », le « choix des personnalités », et surtout les « engagements pris par Michel Barnier sur la nécessité de conforter l’attractivité économique de la France », soulignant que « ces engagements ne sont pas passés inaperçus du côté du Medef ! »
Et pour cause… puisque ces engagements consistent à « réduire les dépenses » et« afficher des perspectives ambitieuses de réforme à Bruxelles » ! En clair : un plan de guerre anti-ouvrier se prépare. Car réduire les dépenses de santé, celles des services publics, celles du logement social et engager de nouvelles réformes anti-ouvrières dans la continuité des précédentes, qu’est-ce d’autre que s’en prendre aux travailleurs et à leurs familles ?
La classe capitaliste est donc bien rangée derrière son gouvernement et « rassurée » par lui. Rassurée aussi de voir la « gauche » respecter le cadre fixé. C’est Bompard, de La France insoumise, qui explique, sur France Bleu Provence, combien il serait « absurde »de « s’opposer systématiquement au gouvernement Barnier ». C’est Faure, du Parti socialiste, qui déclare, à propos de sa propre motion de censure, qu’elle est « vouée à l’échec ». C’est Roussel, du Parti communiste, qui va rencontrer Barnier à Matignon en cultivant l’ambiguïté sur une possible participation à un gouvernement qui mettrait en œuvre des mesures progressistes…
Les capitalistes pensent-ils pour autant pouvoir dormir sur leurs deux oreilles ? Certes, il ne peut y avoir de nouvelle dissolution avant dix mois. Certes, l’adoption d’une motion de censure aboutirait à renverser le gouvernement – à condition que le Rassemblement national décide de la voter –, mais Macron toujours en place désignerait un autre Premier ministre – ou le même – chargé de constituer un autre gouvernement aussi pro-capitaliste que celui-ci.
Reste une inconnue : la lutte de classe.
Au front des capitalistes, il est impératif d’opposer le front des travailleurs unis avec leurs organisations, le front des travailleurs qui ne se laissent pas entraver par ceux qui refusent de rompre avec les institutions et avec Macron. Le front des travailleurs qui s’unissent, se confortent mutuellement, se dressent soudés sur leurs revendications légitimes et dans l’action légitime et résolue. Le front des travailleurs qui ne se laissent détourner de l’action de classe ni par la perspective d’une élection présidentielle en 2027 ni par d’hypothétiques perspectives de dissolution (ou de destitution) toutes subordonnées aux règles et au calendrier de la Ve République. Et donc aux exigences de la classe capitaliste.
Opposé au front des exploiteurs jamais rassasiés de profits et de dividendes, le front des travailleurs, c’est le front de ceux qui n’ont que leur travail pour vivre. Ils sont la majorité. C’est à eux, en démocratie, qu’il doit revenir de gouverner.