Poussière dans le vent

de Leonardo Padura

Leonardo Padura est un journaliste, écrivain, scénariste cubain né en 1955. Il est l’auteur d’une dizaine de romans policiers dont le héros est le commissaire Mario Conde. Il a écrit également de nombreux essais littéraires et plusieurs romans. Parmi ceux-ci, citons en particulier “L’homme qui aimait les chiens“. Ce livre raconte, à trois voix, l’assassinat de Léon Trotsky en 1940 au Mexique. Ces voix sont celle de Léon Trotski depuis son exil à Alma ATA au Kazakhstan jusqu’à son assassinat commandité par Staline, celle de son assassin Ramón Mercader, alias Jacques Mornard et celle du narrateur, un écrivain végétant dans un cabinet vétérinaire de La Havane qui rencontre, sur une plage, en 1977, Mercader.

Le titre de ce nouveau livre est “Poussière dans le vent“(1) publié aux éditions Métailié.  Dans ce livre la politique, l’amour, l’amitié, la trahison, la mort, l’exil se mêlent constamment au travers de la vie des personnages du clan. Le clan, c’est ce groupe de 8 cubains de La Havane qui se retrouvent régulièrement pour des fêtes, des anniversaires, partager la nourriture et les boissons qu’ils arrivent à récupérer à droite et à gauche. Leur histoire commence au moment de la chute du mur de Berlin, à la fin de l’URSS alors que toute l’aide que celle-ci apportait à Cuba va disparaître. 20 ans plus tard, l’espoir que l’embargo des Etats-Unis pourrait disparaître commencera à naître avec la visite de Obama à Cuba.

Mais entre-temps, nombre des membres du clan, cette “confrérie de belles personnes s’efforçant d’être encore meilleurs, des jeunes gens obéissants qui participaient à un exploit historique” s’exilèrent en Argentine, en France, en Espagne, aux Etats-Unis. Clara restera à Cuba avec ses 2 fils qui prendront également par la suite le chemin de l’exil. Pourquoi fuir ? Bien sûr, pour une “vie meilleure” mais surtout pour pouvoir exploiter pleinement ses potentialités professionnelles que ce pays a su développer gratuitement en leur fournissant une instruction de qualité. Échapper aussi à la contradiction qui fait que tous les “humbles travailleurs avaient accès à un système de santé publique de qualité, mais à la pharmacie la plus proche il n’y avait presque jamais d’aspirine, et malgré ça les gens dansaient, chantaient et ensuite effectuaient du travail volontaire, scandaient des slogans révolutionnaire contre l’embargo américain criminel, (…) pendant que ces mêmes gens ou à peu près partaient pour les États-Unis sur des radeaux ou par n’importe quel moyen pour n’importe où, ou bien restaient vivre à Cuba (…)“.

Mais l’exil, s’il règle parfois la question matérielle, laisse toujours les exilés à cheval sur 2 mondes : celui qu’ils ont quitté et auquel ils restent toujours attachés par mille et une racines et celui où ils vivent désormais et qui ne pourra jamais être complètement le leur. “Pourtant, l’impression de vivre au mauvais endroit et au mauvais moment ne l’avait jamais quitté. Il sentait que sa condition d’exilé, d’émigré ou d’expatrié – peu importe, le résultat pour lui était le même – l’avait empêché de penser même à un bref retour et l’avait condamné à vivre une existence amputée, qui lui permettait d’imaginer un avenir mais où il ne pouvait pas se défaire du passé qu’il avait mené jusque-là et à être qui il était, ce qu’il était et comme il était. La conviction de ne plus jamais avoir d’appartenance ne le quittait jamais“.

Certains, à certains moments, se retrouveront montrant ainsi que par-delà les distances et les “aventures “de vie différentes, la fidélité, l’amitié, l’amour seront toujours présents.  Car restera toujours “l’image d’un clan, à présent dispersé à travers le monde, décimé par la mort, mais fondamentalement impossible à briser“.

Jacno

(1) D’après la chanson du groupe Kansas :

“De la poussière dans le vent
Nous ne sommes que de la poussière dans le vent
De la poussière dans le vent
Chaque chose n’est que de la poussière dans le vent
Le vent…”